Formation continue des artistes auteurs, quelles suites au rapport Kancel/Buteaud ?

Jeudi 17 Juin 2010, le Ministre de la Culture a déclaré :

Je pense enfin à la formation continue, à laquelle nous portons
collectivement beaucoup d’attention, et ce n’est pas Monsieur Jacques
Legendre qui me contredira ! Cet enjeu crucial connaît aujourd’hui une
actualité particulière. D’une part, nous inaugurons cet après-midi les
nouveaux locaux de l’AFDAS, un organisme aussi dynamique qu’innovant.
D’autre part c’est aussi aujourd’hui que vous est remis, dans le dossier de
cette plénière, le rapport sur la formation continue des artistes auteurs,
réalisé par l’inspection générale des Affaires Culturelles (IGAC), par
Messieurs KANCEL et BUTAUD, en même temps qu’il est adressé aux
autres acteurs concernés. Il s’agit d’un rapport important et que je sais très
attendu, puisqu’il vise à remédier à une carence, celle qui fait que les
artistes auteurs n’ont pas, aujourd’hui, la possibilité effective de bénéficier
de droits à la formation continue. Le rapport émet un certain nombre de
préconisations qui, certes, à ce stade, n’engagent que ses auteurs : la
constitution d’un fonds « assurance formation » à partir de contributions
des artistes auteurs, des diffuseurs et d’une participation des Sociétés de
perception et de répartition des droits, et la gestion de ce fonds par un
dispositif rattaché à l’AFDAS. Ces propositions, qui me paraissent
particulièrement intéressantes, doivent évidemment faire l’objet de
concertations approfondies, que je demande à la direction générale de la
création artistique de coordonner. Elles devront aussi continuer à être
expertisées au niveau interministériel, avant que des décisions puissent
être prises, compte tenu des spécificités qu’elles comportent. Mais je serai
très attentif à ce que ce sujet, porteur d’avancées sociales importantes
touchant le respect des droits d’acteurs importants de ce secteur, puisse
maintenant avancer rapidement.
extrait du discours de Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, prononcé à l’occasion du Conseil National des Professions du Spectacle (CNPS)


Le 28 septembre 2010 une réunion sur la formation professionnelle des auteurs s’est tenue au ministère de la culture,
une cinquantaine de représentants étaient présents.

Cette réunion était présidée par Claire Lamboley, conseillère chargée des affaires sociales et des enseignements du spectacle vivant. Etaient également présents des représentants du cabinet du ministère de la culture et du secrétariat d’état à l’emploi, des représentants des artiste auteurs, des représentants des diffuseurs, des représentants des Société de Perception et de Répartition des Droits (SPRD).

Nous avons constaté avec plaisir une volonté interministérielle forte d’avancer sur ce dossier : la Direction Générale de la Création Artistique (DGCA) a été désignée pour piloter le projet. Le rapport de Messieurs KANCEL et BUTAUD est apprécié et constituera la base du travail à engager. On peut imaginer une mise en œuvre effective pour janvier 2011.

Pour Claire Lamboley, les points suivants peuvent être considérés comme actés :

  • Le principe de la formation permanente des artistes auteurs assujettis et affiliés.
  • Le financement de plusieurs sources :
    • Une contribution financière proportionnelle et non forfaitaire des artistes auteurs.
    • Une contribution obligatoire des diffuseurs.
    • Une contribution volontaire des SPRD.
  • Des cotisations obligatoires : 0,45% auteurs et 0,1% diffuseurs
  • Des cotisations volontaires :
    • De la part des sociétés d’auteurs qui doivent se concerter et proposer quelque chose
    • De la part des établissements publics (CNL, CNC, DAP…).
  • Une incitation à introduire dans les nouvelles conventions Etat-régions relatives à la formation professionnelle un volet formation permanente des artistes-auteurs.
  • Une gestion par l’AFDAS de l’argent qui transiterait via l’AGESSA et la MDA ; mais ce fonds constitué sera étanche et autonome. Une question reste à régler au sujet de la gouvernance de ce fonds « artistes auteurs ».

Les positionnements des différents acteurs au cours de cette réunion :

  • Le groupe des artistes auteurs (groupe des 17) est favorable aux préconisations du rapport KB, mais suggère une contribution diffuseur supérieure à 0,1%, argumentant sur l’idée que développer la formation professionnelle est aussi dans l’intérêt des diffuseurs dont les ressources et l’activité découle de celle des auteurs-artistes et non dans le seul intérêt de ces derniers. Il nous apparaît nécessaire de rééquilibrer ce 0,45% / 0,1% en faveur des auteurs-artistes Il est également envisagé que la contribution des SPRD soit obligatoire à un taux minimal qui reste à définir.
  • Les galeristes vivent cela comme une taxation supplémentaire et ne se sentent pas concernés par cette question.
  • La SCAM (Société Civile des Auteurs Multimédias) est favorable mais demande des précisions sur les questions de taux, de plafonnement, et le cas des auteurs ayant plusieurs sources et types de revenus.
  • La SACD (Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques) est favorable mais attire l’attention sur le danger du déplafonnement du revenu pris en compte. Propose un plafonnement sur la base de la sécurité sociale comme ça se pratique pour l’assurance vieillesse. La SACD abondera sur le fonds sur la copie privée. Est d’accord pour le choix de l’AFDAS et aidera pour la mise en place en janvier 2012.
  • Les producteurs (diffuseurs) n’ont pas d’opposition au principe d’une formation permanente mais veulent s’assurer que les SPRD contribueront ; ils regrettent que les éditeurs musicaux n’aient pas été contactés et ne comprennent pas pourquoi les diffuseurs se voient taxés : ils sont défavorables à cela. Ils s’opposent à ce que les SPRD de producteurs diffuseurs soient mises à contribution.
  • La SPRD des producteurs phonographiques indépendants se dit opposé à payer 0,1%, ils font déjà de la formation pour leurs jeunes artistes, c’est dans les contrats d’exclusivité.
  • Les sociétés de gestion des droits voisins ne souhaitent pas cotiser.
  • La Maison Des Artistes rappelle que si les 10 années passées ont été l’occasion de recenser les artistes (ils sont passés de 19.000 à 56.000), il est nécessaire, sur les 10 années qui viennent, de recenser les diffuseurs. Le nombre de 2.000 galeristes en cours il y a 10 ans est-il toujours d’actualité ou a-t-il augmenté ? Quid des collectivités territoriales ? Un meilleur inventaire des diffuseurs fera monter l’assiette de recouvrement.
  • La SGDL (Société Des Gens de Lettres) explique que le livre est un secteur sinistré, que l’écrivain va mal, et que 0,45% de taxation, c’est énorme pour un auteur qui vit déjà chichement. Il demande à ce que soit mis, en compensation, une protection pour les très bas revenus. Il n’est pas loin d’être contre le principe même d’une formation pour les auteurs.
  • La charte des auteurs illustrateurs (1000 adhérents) demande également que le taux de 0,45% soit revu à la baisse et que le rééquilibrage avec les diffuseurs soit meilleur.
  • Le secrétaire d’état chargé de l’emploi indique qu’il ne s’agit pas de taxation, mais d’investissement. Les auteurs sont la seule profession à ne pas avoir de droit à la formation.

Création d’un groupe de travail en octobre 2010

Depuis cette réunion au ministère de la culture, un groupe de travail a été formé pour travailler avec la DGCA comprenant des représentants des auteurs (le CAAP sera présent), des diffuseurs et de représentants des SPRD qui a pour mission d’affiner la mise en application du dispositif, notamment le financement et la gouvernance du futur fond.

La première réunion se tiendra le 28 octobre.

Nous vous tiendrons informés des suites données à ce dossier.

Post-scriptum

Pour plus de détails voir le Cr de la réunion du 28 ; document pdf joint

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