Du nouveau pour la formation des artistes auteurs ?

Les artistes-auteurs sont toujours privés du droit à la formation professionnelle pourtant inscrit comme une obligation dans le code du travail.

La publication du rapport intitulé “propositions pour la mise en place d’un dispositif de formation continue pour les artistes-auteurs” confirme certaines préconisations du CAAP : participation possible pour les assujettis, cotisation proportionnelle aux revenus et contribution des diffuseurs.

Mais nous sommes très surpris, par contre, que le rapport pose la question de la participation au financement du dispositif par les galeries et les sociétés de vente aux enchères, puisqu’elles profitent directement de l’activité des artistes auteurs.

Nous nous interrogeons par ailleurs sur le choix de l’Organisme Paritaire Collecteur Agréé et sur ses modalités de gouvernance.

Enfin, ceci n’est qu’un rapport qui n’engage que ses auteurs, tient à préciser Georges-François Hirsch...

Le CAAP, ainsi que les autres organisations professionnelles, tout comme les associations et collectifs fédérés à la FRAAP, se battent depuis de nombreuses années pour que les artistes-auteurs accèdent au droit à la formation professionnelle. Un droit inscrit comme une obligation dans le code du travail mais dont les plasticiens sont encore privés.

Une enquête menée par la FRAAP auprès de 1250 artistes, avait permis de préciser leurs besoins essentiels et des demandes spécifiques, qu’ils soient directement liées à la pratique artistique ou à l’environnement professionnel. L’étude proposait également quelques pistes pour l’élaboration d’un futur dispositif.
http://www.fraap.org/article431.html

Suite à la demande pressante des organisations professionnelles d’auteurs, le 26 août 2006 le ministère de la culture a missionné l’inspection générale des affaires culturelles pour l’établissement d’un rapport qui devait être rendu en novembre.

Ce rapport intitulé “propositions pour la mise en place d’un dispositif de formation continue pour les artistes- auteurs” a finalement été remis en décembre 2009 au Ministre de la Culture et de la Communication par Gilles Butaud, chargé de mission et Serge Kancel, inspecteur général.

Six mois après la remise du rapport, ce dernier vient enfin d’être rendu public et communiqué aux organisations professionnelles concernées.

Nous sommes particulièrement satisfaits de constater que les préconisations du CAAP (parfois minoritaires au sein de l‘ensemble des représentants des auteurs) se voient confortées par les rapporteurs sur des points essentiels.

Nous avons notamment toujours refusé que les assujettis de la MDA soit exclus du droit à la formation continue au profit des seuls affiliés. Le rapport conclut à la non pertinence de cette distinction.
Nous étions également opposés à une cotisation forfaitaire (établie par analogie aux professions libérales) et favorables à une cotisation proportionnelle au bénéfice non commercial de l’auteur, et ce, sans plancher, ni plafond, socialement injustes. L’option simple et juste d’une proportionnalité au revenu est retenue par les rapporteurs.

Nous sommes également satisfaits que le rapport préconise une participation financière des diffuseurs, les effets de la formation continue des artistes “bénéficient directement aux producteurs et aux diffuseurs qui procèdent à l’exploitation des œuvres”.

En revanche se poser la question de savoir si les galeries ou les sociétés de ventes aux enchères doivent contribuer ou non au financement du dispositif nous paraît dénué de sens dans la mesure où elles profitent directement de la vente d’œuvres donc de l’activité des artistes-auteurs. Que l’assiette des cotisations de ces diffuseurs soit fondée sur leur propre rémunération via les commissions qu’ils retiennent aux artistes sur la vente de leurs œuvres (plutôt que sur la somme payée aux artistes comme c’est le cas pour les autres diffuseurs) ne nous apparaît nullement de nature à justifier une exonération.

En ce qui concerne le choix de l’opérateur (ou OPCA : Organisme Paritaire Collecteur Agréé), l’hypothèse de la création d’un nouvel opérateur spécifique est écartée d’un revers de main par le rapport : l’heure étant “à la limitation en nombre des opérateurs”. Autrement dit la création d’un nouvel opérateur n’est pas préconisée, ni même étudiée, parce que, dans ce cas, un opérateur de plus serait créé ! Nous considérons que cette tautologie peut difficilement tenir lieu d’argumentaire. Sachant que les fonds prévisionnels drainés seront supérieurs au montant critique nécessaire à la création d’un opérateur autonome, nous regrettons vivement que cette hypothèse n’ait pas été analysée avec le même sérieux que le rattachement à des opérateurs existants - tels le FIF-PL et l’AFDAS - pour la future gestion du dispositif de formation continue pour les auteurs.

En ce qui concerne la gouvernance de l’Organisme Paritaire Collecteur Agréé, nous sommes d’accord pour que “la nomination des membres des deux collèges soit effectuée par les organisations professionnelles” dont la représentativité est attestée par les élections au sein des conseils d’administration de la MDA et de l’AGESSA.

Pour autant ce conseil de gestion mixte (auteurs/diffuseurs) ne nous semble pas devoir être strictement calqué sur celui de ces conseils d’administration. Nous n’ignorons pas que les 3 syndicats de diffuseurs qui siègent au sein de la MDA (Comité des Galeries d’Art ; Chambre Syndicale de l’Estampe, du Dessin et du Tableau ; Syndicat National du Commerce de l’Antiquité, de l’Occasion, des Galeries d’art moderne et contemporain) sont également les plus opposés à toute contribution financière à notre futur dispositif de formation continue. Or s’ils étaient exonérés comme semble le suggérer le rapport, nous ne voyons pas ce qui justifierait leur présence au sein de ce conseil de gestion. Nous suggérons un conseil de 27 membres dont 21 représentants des artistes-auteurs et 6 représentants des diffuseurs qui contribuent effectivement au dispositif.

Nombre de points de détail sont à étudier de plus près, néanmoins nous considérons ce rapport comme une avancée globalement positive vers la mise œuvre du droit à la formation continue des auteurs. Nous espérons qu’il ne restera pas lettre morte, comme ce fût le cas pour d’autres rapports de l’inspection générale...

La lettre d’accompagnement du rapport (annexe) signé par Georges-François Hirsch, directeur général de la création artistique (ministère de la culture) précise : “une large concertation sera engagée dans les meilleurs délais sur ce rapport, sur la base des préconisations suggérés par les inspecteurs”. Au delà de cette louable déclaration d’intention, nous demandons qu’une date de réunion de concertation soit effectivement fixée dès maintenant.

Monsieur Hirsch ajoute : “je précise que celles-ci à ce stade n’engagent que les auteurs du rapport, et doivent notamment faire l’objet de réflexion complémentaires au niveau interministériel.”

Nous voulons croire que cette précaution oratoire relève du simple bon sens et non d’une réticence, d’une faiblesse de la volonté politique à faire rapidement et effectivement appliquer un droit qui constitue une obligation nationale clairement inscrite pour tous dans le code du travail mais dont les artistes-auteurs sont abusivement privés depuis trop longtemps.

L’avenir proche nous le dira.

C’est à l’aune des actes et non des discours que nous mesurerons cette volonté politique.

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